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  • : Un jour, une œuvre
  • : Créé en 2006, ce blog rédigé par Valérie Beck autrefois consacré à la danse et à ma compagnie se diversifie davantage.
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Noureev

 

Danser, telle la phalène sous la lune, le pinceau du calligraphe, ou l'atome dans l'infini 

                                              

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9 juin 2014 1 09 /06 /juin /2014 19:32

 

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                                                  Laura Hecquet, en rouge cette fois ci ( photo Guilloteau. l'express)

 

Le palais de Cristal de Balanchine, découvert en 1993 à la Bastille par d’émérites interprètes, m’avait laissé un  tel sentiment d’ennui que je n’étais guère prête à le revoir… sauf que, associé à la création de Benjamin Millepied qui a eu le bon goût de choisir une œuvre de Ravel que j’adore, j’ai passé outre ma «  répulsion ». J’ai accepté l’ennui d’un Balanchine pour le plaisir d’écouter un Ravel, me disant que, même si la chorégraphie m’ennuyait, il me resterait la musique…

 

Ce Palais de cristal, qui a défrayé la presse parce que Lacroix a recréé pour la circonstance de fabuleux costumes, a été vu du fin fond du second balcon…

Une aubaine en fait, pour découvrir qui est réellement charismatique !

Et voici le trio gagnant : Paquette, Hecquet et Thibaut.  Leur silhouette, réduite à une hauteur de phalange d’un auriculaire vu de la haut, n’est en pas moins emplie de lumière, et d’un quelque chose qui happe votre regard et le fait irrémédiablement converger vers eux, où que ces artistes se trouvent sur la scène.

Paquette, en rouge, dansait avec Pagliero, magnifique elle aussi : brillante et féminine à souhait, gracieuse, ses petits pieds cisèlaient les pas avec précision d’horloger suisse. Ces pointes,  coupantes comme des diamants, et ses chevilles déliées si libres, donnaient à sa danse  une attaque  vive, une batterie percutante mais racée. Son visage irradiait le plaisir de danser. Toute parée de rouge, une aigrette plantée fièrement dans sa coiffure, elle était belle et pétillante. Paquette occupait tout l’espace scénique ;  sa danse était large, généreuse. On en oubliait les danseurs alentours  tant ce couple captivait le regard.

 

La couleur suivante était le bleu et là, on se surprend à retenir son souffle devant la délicatesse musicale de Laura Hecquet, à la fois princesse lointaine et fée mélancolique, qui harmonise à la perfection des mouvements souples comme les branches d’un saule à un hautbois aristocratique et empli de spleen. La gravité de son visage renforce une impression de noblesse mêlée à une grâce, une élégance naturelles. Tout est moelleux, abandonné, comme dansé en confidence ; l’intériorité de cette âme touchante palpite presque entre nos mains ; quels mots pour décrire les pliés sautillés sur pointes, exécutés avec tant de douceur, comment décrire un buste qui suit les spirales du hautbois avec une tristesse presque Schubertienne ?

Laura Hecquet restera absolument inoubliable dans cet accord parfait sur une musique latine,  claire,  mais ombrée et embrumée d’un peu de Sensucht germanique.

J'étais trop haut pour admirer toute la délicatesse de Nolwenn Daniel,  magnifique dans son costume blanc-rose, accompagnée par Emmanuel Thibaut en grande forme, aux lignes pures, qui prouve encore   que même  près de la retraite il possède encore du  ballon, des pieds précis,  du plaisir à danser, et une espièglerie enfantine qui ravit le cœur.  En vert sapin, F Alu et V Colosante n'étaient  ni très synchrones, ni très bien assortis…  c'était au final un peu brouillon. C’est dommage. 

Dans l'ensemble, les lignes  étaient plutôt belles et le corps de ballet (ce sont les dernières séries) avait trouvé ses marques, son souffle ; il était bien réglé, même si la danse reste un peu figée, un peu glacée.

montage_millepied_ok.png

 

La création de Benjamin Millepied m’a un peu déçue, je m’attendais à plus d’intensité. Je suis restée sur ma faim.

Côté orchestre,  déception aussi : sans doute à cause de la danse, les tempos  retenus sont trop lents et trop étirés,  d’une manière générale ; en revanche, le lever du jour a pris le TGV…. Quel dommage, au lieu que les contrebasses paressent langoureusement pendant que les chants d’oiseaux surgissent tranquillement puis s’étirent doucement de leur torpeur, elles cavalaient après eux… à peine sorties de leur songe, les voilà qui s’ébrouent si rapidement que tout semble trop nerveux, trop rapide… l’orchestre a une belle transparence, les pupitres sont bien équilibrés, mais le tout manque un peu de cette sensualité profonde que certains chefs parviennent à donner à cette œuvre délicate et passionnée.  ( Seiji Ozawa, par exemple)

 

Côté chorégraphie, ça n'a pas la puissance d'un Belarbi!

Si je parle de Belarbi, c'est que les danseuses en cheveux longs et jupes flottantes m'ont rappelé son magnifique Hurlevent  et les pirates en noir, les hommes en long manteau, dits « gardiens » de cette même œuvre.

 

Alors, c'est plutôt plaisant à regarder, il y a des moments magiques, mais beaucoup de bavardages, de redites, et de choses parfois un peu naïves.

D’autre  part,  l’utilisation excessive des rondes, boucles, spirales, etc…   finit par  lasser, de même que le procédé de faire partir un mouvement d’un danseur qui le transmet aux autres…

 

De là-haut, les structures de Buren rappellent les cuisines des années 70,  elles masquent d’ailleurs en partie la scène pour certains passages ; du deuxième balcon, les structures ressemblent à de  gros plastiques pendouillant et leur reflet sur la scène blanche est vénéneux.  Les costumes des garçons sont aussi seyants que des baby-gros pour adultes…

 

Côté danseurs, c’était bien dansé : la magnifique silhouette d’Albisson  est vraiment  mise en valeur daphnis.jpgpar la chorégraphie. Fluide, poétique, fraîche, Albisson est une Chloé belle, attrayante.  Marc Moreau danse avec cœur et flamme. Mais à aucun moment on ne sent ces deux artistes véritablement amoureux. Il manque un petit quelque chose pour qu’on sente cet amour.

Fabien Revillon a incarné son Bryaxis avec panache et virtuosité. Le pas de deux avec Léonore Baulac  avait une vraie force et poésie.  

Léonore Baulac est tout simplement fascinante. Séductrice, séduisante, souple comme une liane, on ne la quitte plus des yeux dès qu’elle est en scène.

 

 

Je me demande cependant ce que cette œuvre aurait donné avec la distribution suivante :  Abbagnato, Pujol, Ganio, Alu, elle était mon premier choix au départ.

 

Mais qu'aurait été  cette œuvre  si Millepied avait eu quatre mois au lieu de quelques semaines pour régler la chorégraphie? Certaines scènes restent en mémoire et le tout se suit aisément. Revue sur culture box, j’ai été stupéfaite de constater comme le propos change sitôt que l’on voit l’œuvre de face et de près.  Certains passages y gagnent, d'autres pas du tout.

 

Si elle est reprise dans les années à venir, il est fort possible que Millepied la remanie comme c’est souvent le cas. Une œuvre poétique, assurément, mais à laquelle il manque un peu de force, ou de conviction... 

 

De cette soirée du 7 juin, me parvient,  en écho, sublime et irréelle,  Laura Hecquet,  dans son tutu bleu strassé,  si belle, avec son visage plein de gravité et de délicatesse.

Je lui ai d’ailleurs consacré un modeste article que je compte bien enrichir de photos et de détails biographiques dans les mois à venir.

J’aurais tant aimé la voir passer première danseuse au concours de cette année.

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15 mars 2014 6 15 /03 /mars /2014 08:35

 

Lettre ouverte aux directeurs,  directeurs adjoints  de l'opéra de Paris et ministre de la culture  en mon nom propre.

Sur notre forum figure une lettre un peu différente que vous pourrez lire et signer si vous vous sentez concernés....    http://dansespluriel.soforums.com/index.php

Ces deux lettres seront envoyées en début de semaine prochaine

 

 

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Par cette lettre, je vous fais par de mon indignation quand aux prix des places pour les ballets  pour la saison 2014 - 2015 . Ce qui m’outre le plus, est la mauvaise foi générale, et la déclaration  à la presse, comme quoi il n’y a pas de hausse de prix. Les personnes qui vont régulièrement à l’opéra depuis cinq ou six  savent très bien à quel point ces déclarations sont des mensonges. Et je ne parle pas même pas de celles qui y vont depuis plus longtemps encore.

 

D’une part, il y a eu un redécoupage des différentes catégories, ce qui fait que certaines places en catégorie 5 qui étaient au départ à 12 euros il y a quatre ans, coûtent à présent 25 euros ; cela fait du 50 pour cent d’augmentation ; il s'agit des  4ème loges de côté qui étaient en catégorie 5 et sont passées en catégorie 4

 

Certaines places du parterre de Bastille sont passées de la catégorie 4 à la 3 et à la 2 en quelques années. Ce sont les places le plus sur le côté.  Comme c’est sur celles-ci qu’il y a eu les plus grosses augmentations, ces places  ont donc subi une augmentation de près de 100 pour 100.

 

En outre, la création de la catégorie Optima est un vrai scandale ! Surgi de nulle part, cette création  a augmenté des places déjà coûteuses de près de 70 pour cent (80 euros à 135 euros). Et vous osez affirmer à la presse qu’il n’y a pas eu d’augmentation ?  C’est vraiment  prendre les gens pour des imbéciles !

 

 

Quand j’ai commencé à aller à l’opéra en 1980, la catégorie 1 coutait 105 francs – 16 euros

 

Trente ans plus tard, la même place  coûte 130 euros ; il s’agit donc d’une hausse de 800 pour cent…. Il ne s’agit donc pas d’indexation par rapport à la crise, mais bien d’une politique purement et volontairement axée sur  le maximum de gains même si cela n’était pas nécessaire, car tous les rapports stipulent que l’ONP a un taux de remplissage pour les ballets avoisinant les 97 pour cent

 

Le résultat d’une telle politique – car même les places de 4ème catégories sont passées de 18 à 25 euros, soit une hausse de 50 pour cent, et la troisième catégorie est maintenant à 50 euros et a subi une hausse analogue – est d’exclure toute une catégorie de la population ou de la contraindre à ne pouvoir s’offrir  que de la 4 ou de la 5ème catégorie. Quand on sait comment on y est assis….  

 

 

Et je ne parle pas de ces rangs supplémentaires mis dans les loges, qui font qu’on est à moitié assis sur ses voisins pour la somme de 70 euros … quand on est pas obligé de passer la moitié du ballet debout pour voir quelque chose si peu que les personnes des premiers rangs soient un peu grandes…

 

Auriez-vous oublié que l’ONP est financé en partie pour l’état donc par les impôts des Français ?  En l’occurrence par nos impôts ?

Quelle est cette politique a des années lumière de l’ouverture culturelle faite dans les années 1980 pour ouvrir les grandes maisons d’opéra au maximum de gens ?

 

Quelle est cette hypocrisie que d’offrir dix mois d’opéra à des enfants issus de cités dont les revenus parentaux à deux n’excèdent pas 5 places en catégorie Or ? Est-ce pour leur montrer ce à quoi ils n’auront au final jamais accès ?

 

 

Nous faisons actuellement un magnifique retour en arrière. On se croirait de retour à l’époque de la monarchie. Sûr que pour les membres les plus fortunés de l’Arop, tout ceci ne fait aucune différence, mais pour «  le Français moyen » c’est choquant et révoltant.

 

Que l’opéra soit hors de prix est déjà choquant – mais que le ballet le devienne alors qu’on sait que les danseurs sont des fonctionnaires d’état l’est encore plus.

Car les danseurs n’ont pas  des cachets hors de prix, comme c’est le cas pour les chanteurs, les metteurs en scène ou les chefs d’orchestre qui se font payer à prix d’or  pour l’opéra.

 

Tout cela me révolte, et je ne peux accepter que le ballet de l’opéra de Paris qui est un ballet d’état dans un théâtre d’état concurrence les prix et même les dépasse, des théâtres privés  et tombe dans cette image élitiste qu’il avait réussi à quitter.

 

Autrefois, il y avait des prix pour les matinées et pour les œuvres avec bande son au lieu d'un orchestre qui était 20 pour cent moins chers et qui ont disparu il y a six ans.

 

 

Alors les prix pour les lundis ne feront pas passer le reste du prix à payer.

Pensez vous à ceux qui habitent en Province et ne peuvent pas venir à Paris ? Ou à ceux qui en plus du train, de la place, sont obligés de dormir sur place ?

 

Mais j’ai oublié : le parisianisme forcéné fait aussi partie de la panoplie de ces financiers qui se sont penchés sur les schémas des salles afin d’en tirer le plus grand profit.

Sans doute pour gaver les membres de l’Arop de champagne et de petits fours lors de ces manifestations qui leur sont réservées.

 

Je suis partagée entre la honte, la douleur et la révolte de voir   que les gens de pouvoir font  de cette maison une entité de luxe, réservée à une élite.

 

A quand le port obligatoire du nœud papillon ou de la robe de soirée pour venir voir un ballet ?

 

 

 

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4 mars 2014 2 04 /03 /mars /2014 09:45

Soirée d'adieu du 28 février  d'Isabelle Ciaravola

 

Tatiana : Isabelle Ciaravola

Onéguine :  Hervé Moreau

Lenski  :  Mathyas Heymann

Olga :  Charline Giezendanner

 

 

 

 

 

Lors de la dernière reprise en décembre 2011, j’avais eu le plaisir de voir la Tatiana d’Isabelle avec Mathieu Ganio. J'étais impatiente de découvrir cette même Tatiana aux côtés d'Hervé Moreau.

  Ce danseur mince, musculeux, mais très fin exhale dès son entrée une puissance, une autorité souveraine. Sa technique, aiguisée comme une lame de couteau, dessine  un personnage noir, odieux, en colère contre lui-même. Sa rencontre avec Tatiana fait froid dans le dos : la jeune fille, lointaine et douce, peu préoccupée des choses qui amusent ses proches, tombe sous le charme immédiat de cet homme hautain et tranchant comme une faux qui oublie jusqu’à sa présence. La première variation d’Onéguine est un concentré de lassitude, d’aigreur et de douleur. Il n’a plus de rêve. On aurait envie de souffler à Tatiana de fuir.
 Je ne sais toujours pas comment Ciaravola fait pour passer d'une presque enfant mélancolique, un peu hors du temps,  pleine de compassion pour les autres, la tête emplie de romans à la femme accomplie et rayonnante qu'elle devient au troisième acte. Aux angles durs, secs, aux arabesques pointues d’Onéguine, elle oppose une silhouette ondoyante et  délicate, toute en finesse et en délié, et son regard limpide. On ne pourrait imaginer un couple plus mal assorti.

Le pas de deux dans la chambre est  intense, fluide et glacial tout à la fois : on dirait que c’est la mort elle-même qui a surgi du miroir, et non pas un amoureux. Lors des portés vertigineux et périlleux, Isabelle n'est qu’une plume dont se joue celui qu’elle aime. Là où elle exprime la douceur du désir, il montre la force de son emprise sur elle. A son réveil, elle décide de lui faire parvenir sa lettre : son geste est réfléchi et passionné tout à la fois.  Tatiana est douce mais déterminée.

L’ Olga de Giezendanner,  est pleine de vie, malicieuse et  beaucoup moins superficielle que dans le roman. Cette sœur,  aux antipodes de Tatiana,  forme avec  Lenski un couple plein de fraîcheur : Heymann est parfait en  poète candide qui n'a pas vingt ans et qui met le monde en vers parce qu’il est amoureux. Sa technique a la rondeur et la candeur de l'enfance par encore quittée.  

 

  La scène du bal qui fera tout basculer, évoque les quatuors de Don Giovanni  ou des Noces de Figaro, où chacun chante un sentiment différent entremêlant des émotions parfois aux antipodes.  Onéguine enrage, Olga s’amuse, Lenski est blessé, Tatiana pressent le drame. Tout finira par la mort absurde du poète, plongeant les deux sœurs et Onéguine lui-même dans la douleur la plus totale. Juste avant le duel, les adieux de Lenski-Heymann à la vie sont poignants.

 

Pour le dernier acte, Paquette-Grémine semblait très ému.  Il est un mari aimant  mais sérieux. Parée de sa robe rouge, Ciaravola/Tatiana  aime son mari  et assume à présent parfaitement une place importante dans la société. Elle se plie de bonne grâce aux devoirs de son rang. Quand elle croise Onéguine, elle reçoit un choc, mais reste maîtresse d’elle-même ainsi que l'exige son statu.
Onéguine, bouleversé par cette rencontre,  revivra son passé dans une sorte de frénésie touchante : on se trouve pour un court instant en osmose avec lui, son cœur nous est enfin ouvert. A ce moment là, Hervé Moreau est comme un chat écorché, tout à vif devant la douleur des souvenirs.

Dans le dernier pas de deux, Onéguine montre une telle violence dans l'intensité de  ses sentiments  qu’il en devient brutal. Il impose sa passion avec une rage excessive, utilisant sa force physique pour convaincre Tatiana  de son repentir.  Ciaravola oscille sans cesse entre l’abandon à cette passion restée vivante en elle, et le refus d’y céder.  Elle finit par déchirer la lettre d’Onéguine,  parce qu’il n’y a pas d’autres choix possible mais ce geste la brise. Et dès le départ d’Onéguine,  elle tombe à genoux, anéantie.

Ce pas de deux a atteint des sommets d’intensité dramatiques. Les deux danseurs semblaient survoler toutes les difficultés techniques, et n’être plus à ce moment là que sentiments passionnés et douleur profonde.

L’ensemble du ballet a été porté avec émotion d’un bout à l’autre par une troupe soudée et harmonieuse et des solistes de haut vol. Cette représentation rejoint les «  inoubliables » parmi lesquelles cette année, il y a aussi la Dame aux camélias et Le Parc, toujours avec Isabelle Ciaravola.

 

 Autre lecture

 

 

Il est passionnant de voir que la lecture est très différente de celle que fait Mathieu Ganio, plus fidèle au roman. Les pas de deux par exemple, n’ont pas cette violence, cette brutalité qui fait frémir. Avec Mathieu Ganio, Onéguine est bien l’Harold Childe de Byron, auquel s’identifiait Pouchkine et non pas le personnage noir qu’on trouve aussi dans l'oeuvre de Musset, « confession d’un enfant du siècle » auquel Sami Frey donnait un visage     implacable.

Celui de Ganio est plus slave, il porte en lui un spleen, une Sensucht typique de ce siècle ; il blesse par incapacité à avoir envie de vivre, ce que Pouchkine décrit dans son roman. Mais il n’est pas cruel ; quand il déchire la lettre, c’est pour protéger Tatiana de lui-même ; le pas de deux du miroir est lyrique et passionné. Et au troisième acte, la prise de conscience qu’il aime Tatiana est réel. Il ne vient pas s'emparer d'elle de force mais lui dire avec d’infinis regrets   tout l’amour qu’il porte en lui.

Les deux Onéguine sont aussi splendides l'un que l'autre, le premier est tranchant comme une faux, le second, insaisissable et fantasque et leur partenariat avec Ciaravola est également poignant.

    
 
 

 

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25 janvier 2014 6 25 /01 /janvier /2014 10:12

Quand on n'a pas le choix, on a l'embarras n'est ce pas?

C'est ce à quoi Dame B a habitué les malheureux spectateurs réguliers et les balletomanes depuis déjà plusieurs saisons.... si elle restait encore un  peu,  je crois qu'on assisterait même à des ballets virtuels, avec renfort d'image en trois D, pour supplér aux " trous" des grilles de distributions...

 

Les distributions sont tombées.... et il y a de quoi être vraiment consterné.

Trois titulaires pour les rôles de Tatiana ou de Onéguine. Même chose pour Lenski et Olga; on nous ressert du Magnenet!.... Fabien Révillon apparaît à peine...

 

Il y a trois ans, cela avait déjà été un vrai casse tête pour réunir une distribution digne de ce ballet...

Mckie étant recruté en urgence aux cotés d'Aurélie Dupont,  et dans la panique totale, personne ne voulait assurer la première... bref....

 

Là, c'est pire encore  :

 

Pour Tatiana, Ciaravola, Pagliero et Albisson.....

 

Pour Onéguine : Hoffalt, Moreau et Paquette...

 

 

J'ai beaucoup, mais beaucoup de mal à imaginer Albisson en Tatiana; dans la Belle, j'ai plus vu un Trader aux dents longues, arpentant Wall street, qu'une princesse.... alors Tatiana!

Bon, d'aucun diront qu'au contraire, c'est en dansant qu'elle apprendra à développer son artistique...

sans doute.. mais sans moi...

 

Quand à Pagliero, elle a une énergie de feu pur.... les rôles où je l'ai aimés étaient Kitri, flamboyante et Gamzatti... en revanche, dans des rôles plus lyriques ou plus classiques, j'ai été moins convaincue...

 

Pour Onéguine, je regrette vraiment la présence de Mathieu Ganio....  même si je me réjouis de voir deux fois le couple Ciaravola/Moreau accompagné de :

Giezendanner + Marc Moreau

Ou Marion Barbeau + Heymann

 

J'attendais les distributions pour y retourner une 3ème fois, mais je crois que je m'arrêterais là....

 

Ont donc disparu des distributions : Ganio, Ould Braham et Pujol... il paraît que les distributions vont changer, on ne s'en étonnera pas....

et pendant ce temps, tout le beau monde répète Melle Julie  ou Fall river legend.... 

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31 décembre 2013 2 31 /12 /décembre /2013 11:17

Le Parc – Prejlocaj

 Isabelle-Parc.JPG

 

Belle surprise que ce Parc qui ne m’avait pas convaincue en DVD et que j’ai véritablement découvert le 28 décembre dans la très belle distribution de cette matinée, avec Ciaravola/Bullion. Je ne m’attendais pas à tant de nuances de sentiments, de contrastes, et d’humour aussi.

Prejlocaj a pris le parti d’illustrer à la fois les Précieuses de la fin du 17ème siècle, et la société libertine de la fin du 18ème.

On est à mi chemin entre Roxanne et Marivaux, entre  la Princesse de Clèves et Beaumarchais.

 

Dans le premier acte, les Précieuses-Libertines, costumées comme des garçons,  revendiquent leur égalité dans le jeu du marivaudage : je t’approche, je te fais de l’œil, mais je reste la maîtresse du jeu ! Pas question de céder !

Il faut voir comme la troupe de l’opéra de Paris s’en donne à cœur joie pour installer ses chaises. On s’approche, on s’observe, on recule, on se séduit, on se dérobe, on se moque, on pouffe, puis on revient joyeusement à la charge ; le point culminant de cet acte est lorsque le jeu tourne aux chaises musicales,  qui est comme un clin d’œil à  celui de l’Amadeus de Milos Forman. Mozart aimait aussi le marivaudage, comme en témoignent certains documents, et ses soirées étaient parfois fort libertines…  peut être le choix de la musique vient-elle de là…

Dans ce climat où filles et garçons jouent à «  attrape moi si tu peux » un couple se rencontre. Le jeu cesse, l’amour s’impose. Mais va-t-on écouter son cœur ? Il y a tant de questions qui se posent : que faire de cet amour, comment le vivre, est-il possible de s’y abandonner, de lui faire confiance ?

Ciaravola et Bullion donnent beaucoup de gravité et de détresse au milieu de la joyeuse troupe qui s’amuse et batifole. Lui se rappele que l’amour fait surtout souffrir, et les anciennes blessures animent sa danse ; il ne peut ouvrir son cœur, et les cabrioles de joie où s’anime un cœur amoureux,  s’achèvent par des pas qui s’esquivent ; impossible se déclarer. Face à lui qui hésite, comment pourrait-elle s’abandonner ?  La peur est là aussi, de se perdre, peut être, d’être trahie, ou trompée. Entre ces deux là, le jeu a cessé. Isabelle donne à cette femme une fragilité extrême, une grande beauté, et une gracilité empreinte de noblesse. Bullion donne sa grande sensibilité et profondeur à ce personnage.

 

Le début de l’acte suivant  exprime en quelques minutes toute la poésie d’un groupe de femmes en grande toilette fleurie, qui étouffent sous la chaleur de la fin d’un après midi d’été. Et cette fois ci, on pense à la sieste d’Autant en emporte le vent, lorsque les demoiselles ont défait jupe et panier pour dormir dans la chaleur du Sud, tandis que Scarlett, elle, ne se déshabille pas : elle veut dire son amour à son cousin et part à sa recherche dans la maison, toute enrubannée de frou-frous et de rubans verts. Après quelques évanouissements et beaucoup de rire, jupes et paniers sont abandonnés et il ne reste que le corset et la chemise.

 

Le-Parc-0002.jpg                       Photo Michel Lidvac

 

 

La belle jeune femme arrive, dans son immense robe rouge : la passion qui couve, mais les mètres de tissus et le large panier permettent une protection : l’amour est mis à distance  et la jeune femme se protège dans sa robe-abri. Tandis que les autres jeunes femmes   s’adonnent à quelques caresses et baisers sous la frondaison des arbres  après avoir couru en tous sens  dans le parc, poursuivies par les garçons et sans céder trop vite,  la jeune femme et le garçon hésitent.

A la fin de l’acte, la jeune femme ne cède pas, elle porte toujours sa jupe et son corset, et bien qu’elle soit submergée par son amour, et prête à céder, elle questionne le jeune homme. Ciaravola est  toute en fragilité  face Bullion tout en blessures ; il n’est pas un de ses libertins aguerris, beau parleur, prêt à tout pour arriver à son but.  Il est maladroit, emprunté, un peu gauche, peu sûr de lui,  et tout empli d’une sensibilité qui lui retire l’audace et la bravoure.  On est face à deux êtres que la vie a blessés.  Il est surprenant de voir comme ces deux artistes règlent leur duo comme le feraient deux acteurs ; sans mot, on peut pour ainsi dire suivre leur dialogue, et toute la nuance de leurs sentiments, de leurs questions, et même de ce qu’ils ne se disent pas, de ce qu’ils ne s’avouent pas. Les regards, les expressions du visage, les gestes les plus humbles expriment toute une palette de sentiments et d’émotions. C’est tout en finesse, en sensibilité, en retenue et d’une profondeur presque vertigineuse.

 

Dans le troisième acte, la nuit est tombée ; c’est sous un ciel plein d’étoiles que triomphent les libertins sur les jeunes filles qui ont cédé et le regrettent.  Plus de pantalons, plus d’égalité,  plus de robes fleuries non plus, les fleurs sont fanées ; plus de corsets féminins, mais des jupons de tulle noir, des jupes de deuil, dont tout à l’heure, elles revêtiront leur visage et où elles cacheront leurs larmes. L’amour  est consumé/consommé : c’est le temps des larmes, de la désillusion. Les garçons les emportent sans plus de manière, en les hissant sur leurs épaules comme des sacs. Adieu joyeux marivaudage !

Cette petite tragédie qui laisse les libertins tout bondissants s’achève  sur l’ultime face à face où l’amour véritable triomphera – au moins pour ce soir là – entre la jeune femme en rouge, et le garçon au gilet à  fleurs. Les jardiniers retirent l’un après l’autre les vêtements de la jeune femme ;  elle baisse ses armes : c’est une mise à nu de l’âme. Face à elle, le garçon se met à nu aussi.

Prejlocaj fait triompher après les jeux et les larmes un amour sincère, profond, qui tourbillonne. Ciaravola et Bullion ont su donner des accents de sincérité et de candeur désarmantes à ce dernier pas de deux… on se prend à espérer qu’ils seront heureux ensemble, et que cet envol est aussi celui de leurs âmes réunies…

 

Côté danseurs, je les salue ici tous avec enthousiasme, et notamment Yann Saiz – des dons de comique que je ne lui soupçonnais pas - et la si gracieuse Galloni ! Mais tous excellaient à commencer par :

Les-jardiniers.JPGLes quatre jardiniers  - Valastro, Bodet, Couver, Gaillard - étaient réglés comme du papier à musique !

Le reste de la troupe a créé une connivence entre eux fantastique pour le plus grand bonheur de nos yeux émerveillés ! –

Les demoiselles: Bance, Granier, Kamionka, Laffon, Robert, Westermann, Hilaire, Galloni 

Les Messieurs :   Charlot, Renaud, Saïz, Bertaud, Demol, Gasse, Leroux.

 

corps-ballet.JPG

 

  la troupe, parfaite!

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26 décembre 2013 4 26 /12 /décembre /2013 09:37

 

Cet artiste qui est resté longtemps éloigné de la scène est l'un des grands joyaux de l'opéra de Paris. Je dois le voir dans le rôle du prince Désiré dans une dizaine de jours.

La première fois que je l'ai vu, c'était dans un hideux ballet de McGregor. Il entre en scène, mon souffle se coupe. Non seulement sa danse est onctueuse, virtuose, enlevée, vivante, mais surtout, une vraie personnalité se dessine en scène;  ensuite, je n'ai pu le voir qu'en vidéo, sauf dans la Dame aux Camélias, où il incarnait Lescaut. Une danse toujours à couper le souffle, tant pour la beauté quasi spirituelle qui en émanait que pour la sensibilité de l'interprétation de ce personnage.

 

Mais voyez plutôt par vous même : un internaute a eu la bonne idée de publier sur youtube le long et magnifique solo du Prince Désiré, qui a tout pour être heureux mais qui, tel un Harold child, aspire à autre chose. 

 

Dans ce solo qui exalhe un ennui pré-romantique,  - une Sehnsucht puissante et mélancolique -  Noureev a mis non seulement les pas qu'il affectionnait particulièrement mais aussi son âme slave. Chaque lever de bras, détourné, petits pas qui s'enchaînent a un sens.  Chaque saut est un bondissement de l'âme, une quête vers l'inaccessible. Noureev ne mettait pas des pas " pour faire joli" et encore moins pour mettre sa virtuosité en lumière - dans les années 70 elle n'était déjà plus celle qu'elle avait été dans les années 1960 - mais pour exprimer le mal de vivre du Prince.

 

Mais Désiré n'est pas  Siegfried, qui veut fuir la réalité du monde, comme Louis II de Bavière le faisait près de son Lac. Désiré aspire à trouver un sens à sa vie,  et il cherche aussi l'amour.

 

La variation commence par une série de doutes, de questionnements, de silences, avec la figure de l'arabesque fouettée avec changement de bras; puis elle continue avec l'expression d'affirmations sur le non-sens d'une vie de rêve mais creuse. Et enfin, surgit la quête elle même, et aussi la mise à nu de tout ce qu'est le Prince Désiré. Le feu intérieur, la passion, la quête d'un idéal culminent au milieu de la variation : l'aspiration est là, toute entière.... reviennent ensuite les questions, les doutes du début - 3:00 -  mais l'espoir pointe.

la variation s'achève, après une série de petits pas sautillés dans le sol et petite batterie - sur la série de double tours assemblés - 5:00- et une dernière interrogation mêlée d'espoir

 

C'est un alto  qui déroule sa longue mélodie -pas aussi pleureur que le violoncelle, mais plus apte que le violon à exprimer l'âme humaine pour ce passage précis.

 

Noureev aimait Shakespeare et sans doute a t'il pensé à Hamlet en composant ce long solo-monologue du Prince.

 

A présent, regardez Mathias Heymann.... c'est pur, c'est virtuose, mais surtout, c'est profond...

 

J'ai le souvenir dans ce type de rôle d'une émotion semblable : Mathieu Ganio en Drosselmeyer il y a quelques hivers; et N. Leriche en Siegfried il y a plus de dix ans. Simple, sobre, dans un don total d'eux mêmes.

 

 


 

 

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22 décembre 2013 7 22 /12 /décembre /2013 10:21

 

 Belle-21-decembre.JPG

 

 

 

 

albisson-magnenet.JPGQuelques mots sur cette Belle au bois dormant vue en matinée le 21 décembre

  Albisson, excellente technicienne, aux qualités de danse évidentes - superbe placement, ballon, jolis bras - a pour l'instant une personnalité artistique qui manque de maturité.  Certes, elle n'a que 24 ans et une telle maîtrise technique a son âge est plutôt de bon augure. Il faut espérer qu'elle trouvera sur sa route des aînées pour l'aider à mûrir et comprendre ses rôles; sinon, l'opéra aura en elle une belle technicienne mais pas une artiste.

 

A ces côtés, Magnenet a eu quelques jolis moments ; mais il est resté sage tout du long, privilégiant une danse la plus propre possible à l'interprétation d'un personnage; sa ligne est belle, il a plus d’assurance qu’il y a quelques temps, il a du ballon,  l’élévation des sauts est là,  - c’était visible dans la variation de la Chasse, plutôt réussie -  et les tours sont très agréables à l’œil.

Il est dommage que ses pieds semblent sans force, ce qui fait que l’énergie ne va jamais jusqu’au bout des mouvements.  S’il était libéré de ce souci technique, - n'y a t'il donc personne à l'opéra pour le faire progresser sur ce point? -  il pourrait sans doute artistiquement donner plus, car le potentiel est bien là. Il y a plus d’abandon dans sa danse qu’il y a quelques temps ; il a mûri.

 

 

Le ballet, heureusement,  propose une multitude de petits rôles tous plus adorables les uns que les autres ce qui fait qu'on se console un peu d'un couple un peu décevant par rapport à l'histoire qu'ils doivent endosser et faire partager. Parlons en un peu en détail.


 

Carabosse-et-Lilas.JPG 

 

 

A commencer par Carabosse, à laquelle Sabrina Mallen qui porte magnifiquement bien le somptueux

costume noir et violet,  pourrait donner encore plus de férocité ; face à elle, la poétique, douce mais libertaire fée des Lilas de  Marie-Solène Boullet fait preuve d'une autorité naturelle.

Les fées, merveilleusement ensemble, n’ont pas  toutes brillé de la même façon seules en scène ;   la 3ème fée d' Emilie Hasboun était plus en retrait que les autres et pourtant, Emilie a  étincelé dans les Pierres Précieuses, tout comme  Laure Adélaide Boucaud et Fanny Gorse.

Cette même Fanny Gorse danse l’ingrate variation de la fée Violente (en rouge) avec ce qu’il faut de violence, précisément. Elle y montre un tempérament passionné et dose savament passion et élégance. Du grand art. Les arrêts brusques, les index tendus, les décalés du buste, le tempérement bouillonant de la fée est bien là, mais sa poésie aussi.

La jolie  fée canari de Marion Barbeau, vive et mutine à souhait – ses bras pourraient être encore plus précis – et celles de  Léonore Baulac ainsi que  Jennifer Visocchi, adorables dans leurs pas de deux complétaient ce tableau des fées, auquel il manque la 6ème : Valentine Colosante. Sa danse manquait de moelleux et de douceur. Mais   elle a  remplacé au pied levé Laura Hecquet, ce qui peut expliquer cela. En outre, les manches ballons de son costume  remontent trop quand elle lève les bras.

 

La première fée, Bourdon, danse une variation qui ne met pas en valeur ses qualités.

 

 Catalabutte – Pascal Aubin –  nous fait éprouver tour à tour le mépris dû aux faibles et la compassion pour ceux totalement dévoués à leur maître  et près à tout pour les servir. La Reine - Christine Peltzer-   pleine de douceur, d’amour  et de pardon est flanquée d’un mollasson de mari, Florent Mélac, plus louis XVI que Louis XIV. Le pauvre homme ne  sait jamais quoi faire, ni quelle décision prendre et reste souvent empoté  pendant que les autres règlent les problèmes à sa place !

  Les chevaliers du premier acte et les amies d’Aurore débordent de vie et d'enthousiasme.

 A la fin du premier acte, on se prend de pitié pour les trois fileuses – Mélissa Patriarche, Chloé Reveillon et Alizée Sicre

 

Au second acte, les chasseresses et les chasseurs, costumés à la  Watteau  - 100 ans ont passé - évoluent sur fond de ruines. La végétation luxuriante a envahi  les cintres –  et dans ce décor de rêve,  les Dryades évoluent avec légèreté,  grâce, et  poésie. Dommage que le jupon de leur tutu,  soit un peu trop volumineux au niveau des hanches, réduisant  de ce fait leur taille.

 

 

Pour le mariage, l’Or de Cyril Mitilian, aux belles lignes, à la danse moelleuse et  sans raideur, et le Diamant de Aurélia Bellet illuminent la scène.


 

oiseau-bleu.JPGL’oiseau Bleu de Marc Moreau,   un peu trop bondissant lors de son entrée, prend magnifiquement son envol par la suite !

Charline Giezendanner/Florine n'écoute pas vraiment l'Oiseau Bleu ; les petits sauts 4ème attitude sont décalés, les poignets manquent de préciosité.  Ceci est largement compensé par son charisme.

Le duo Florine/Oiseau semble  animé par un seul et même souffle : superbe !

 

 

 

 

 

 

Les deux chats minaudent, se câlinent et se taquinent– Lydie Vareiles et Axel Ibot – pour le plus grand plaisir du public.

les-deux-chats.JPG

 

 

 

 

 

La polonaise et le finale sont enlevés avec bonne humeur et enthousiasme.

 

Pendant les saluts, mon regard était toujours ramené vers Charline, tellement radieuse et lumineuse !

Aurore était plutôt un crépuscule….

 

 

Bref, un beau moment de danse, auquel il manquait cependant de l'émotion comme j'ai pu en voir lors de représentations passées. Je regrette un peu les artistes d'antan. Pontois, pour ne pas la nommer, merveilleuse princesse Aurore,  Fanny Fiat, Céline Talon, Laurent Hilaire... Il m'a manqué la chaleur de ces représentations passées qu'on croit avoir oubliées mais qui hantent sitôt qu'on est confronté à quelque chose de très bien mais d'où l'émotion est absente.

 

 

 

 

 

 

Le mot de la fin :

 

Placée côté cuivres, il est impossible d’entendre les cordes et les bois qui semblent presque en décalage. C’est très déséquilibré ! Qu’est ce que l’orchestre sonne mal de ce côté ! Alors on entend très disctinctement les «  poum, poum poum » du tuba et pas du tout les violons

C'était affreux surtout sur la variation d’Aurore au 3ème acte.

 

Les roses : pourquoi ces affreuses roses jaunes aux horribles pétales mollassons ?

 

Pourquoi Aurore ne jette t’elle plus les roses la seconde fois pour dire «  non, je ne veux pas des prétendants que vous voulez m’imposer, c’est mon cœur qui choisira ? »

 

Et enfin, pourquoi des maquillages si sages ?

 

Où est le bout noir du museau des chats  et leurs moustaches? Les maquillages sont tellement sages que même placé  très près, c’est terriblement fade. Au fond du second balcon, on ne doit rien voir du tout!

 

Enfin, bravo à tous les artistes qui semblaient heureux sur scène !

 Et rendez vous le 4 janvier pour la Belle avec Heymann/Ould Braham !!!  J'espère que l'émotion sera au rendez vous!

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15 décembre 2013 7 15 /12 /décembre /2013 08:57

la_belle_au_bois_dormant.jpgJe viens de regarder le " digest" de cette Belle au bois et au vue des critiques que j'avais lues  autant sur les ratés de Ganio que sur le stress d'Abbagnato, je m'attendais à quelque chose d'assez difficile à regarder

 

Quelle n'a pas été ma surprise!

 

J'ai vu une Aurore idéalement interprêtée, toute en délicatesse, en retenue, mais aussi avec beaucoup de tempérament- Abbagnato utilise la grande fluidité de ses bras, ses épaules et son cou pour exprimer toute une palette de sentiments. Elle est vivante, humaine et princesse à la fois; la composition de son Aurore est très réussie. Dans le montage montré à la télé, son Aurore affirme une belle technique.  Les sauts sont extrêmement légers, les piétinés ciselés,  et tout l'adage à la rose a un souffle qui ne retombe jamais. Son entrée est vive, légère, avec des sauts de chats incisifs et primesautiers, comme on en aime à les voir dans cette entrée.

 

Pour l'adage à la rose, on lui repproche son peu  d'amplitude dans les développés secondes? Pontois ne les avait pas non plus! Il n'empêche quelle mène ce difficile adage jusqu'au bout, sans perdre un seul instant son personnage : courtoise, certes, avec les 4 princes, mais déterminée! Aimable, bien sûr, mais sans pour autant se laisser impressionner...

 

J'ai particulièrement aimé sa variation du 3ème acte : idéalement danseé pour moi! c'est exactement ce genre d'interprétation que je rêvais de voir, et Abbagnato associe à une grande préciosité beaucoup d'élégance, de jeunesse et de fraîcheur!

Elle s'y montre extrêment musicale; elle a une façon de faire les petits retirés du début avec ce quelque chose qui montre à la fois sa délicatesse, son statut de princesse, mais aussi son caractère bien trempé.  Le passage avec le mouvement des avant bras et le pied arrière qui glisse au sol est magnifique, alors que chez bien des danseuses il est ridicule!

 

Quand à Matthieu Ganio, quel beau Prince! Elegance, grande amplitude dans les sauts, ligne superbe qui convient parfaitement bien à ce style de danse et de rôle

Alors oui, il ne ferme pas ses 5ème après les doubles tours ou assemblés? Il rattrape ses petits manques par une poésie et une âme que je préfère mille fois voir à une interprétation propre mais sans coeur

Dommage que la télé n'ait pas proposé la grande variation de l'acte 2 écrite par Noureev

 

Je  profite donc de ce  blog pour saluer leur interprétation et les remercier de ce grand moment de poésie. Les mots qui  décrivent ce que je viens de voir sont : poésie, sensibilité, âme et fraîcheur...

 

 

Tout comme je salue aussi le poétique et miraculeux pas de deux de l'Oiseau Bleu, avec Heymann et Ould Braham

Une perfection!!!!

 

Pour ma part je verrai la distribution Albisson/Magnenet  puis Ould Braham/Heymann

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13 novembre 2013 3 13 /11 /novembre /2013 07:49

 

 

Au moins trois  raisons, non quatre! d’être contente de sa venue !

 

Raison numéro : son nom !

 

537641879 danse benjamin millepied presente une creationAprès Petipa en Russie, Millepied à Paris, c’est savoureux quand même ? Bon, il ne vient pas en tant que chorégraphe mais directeur de la danse, une nuance de taille, mais déjà son nom est un gage de bonne-humeur ! J’entends déjà les blagues circuler dans les couloirs de l’opéra : les danseurs viendront travailler le sourire aux lèvres !

Un tel nombre de pieds est sans doute le signe d’un caractère affable, courtois, joyeux ! En plus, cela lui sera très pratique pour courir d’un étage à un autre, d’un opéra à l’autre !

 

 

La seconde : la Belle Nathalie : elle va vivre une grande partie de son temps à Paris et en est ravie et nous aussi ! Ah, on peut penser ce qu’on veut de Black Swan, n’empêche, elle y était bouleversante… la danse aime vraiment Nathalie : un rôle de danseuse, un mari  danseur… donc nous aussi, on l’aime !

 

La troisième, plus sérieusement, est que le monsieur vient de remettre des videos de sa jeunesse, et c’est de bonne augure : légèreté, précision technique, présence… oui, c’est un vrai danseur qui nous arrive et  qui s’est plus que frotté à la technique classique. Il ne crachera donc pas sur elle, ni ne la méprisera. On peut aller jusqu’à rêver qu’il ne se servira pas du répertoire  classique comme d’une vache à lait pour produire de hideux spectacles contemporains, mais bien pour mettre en valeur la compagnie toute entière, des danseurs étoiles en tête  (et même ceux qui ne dansent plus de classique) …. Jusqu’aux quadrilles ! Allez hop, tout le monde s’y met, s’il vous plaît !

 

La dernière raison est que un peu d’oxygène dans les murs de l’opéra de Paris après le rideau de fer, ma foi, ça ne peut être que bénéfique à la compagnie  de danse.

 

Hilaire, s’il avait pris la suite,  aurait sans doute  continué  la même politique de danse qu’aujourd’hui

Leriche comme Legris connaissent très bien les danseurs, trop peut être.  Ils ont tous les deux fait leur classe à l’opéra, et ont côtoyé la compagnie pendant de longues années.

 

Millepied, lui, débarque d’Amérique, même s’il a fait ses classes à Bordeaux ; il n’a pas dansé avec les plus mauvais,  - Robbins en tête  et Balanchine- Il fut danseur étoile du NY city Ballet.  

Il aura donc  un regard neuf, un regard frais  sur la compagnie, et sans doute aussi admiratif devant l’excellence de la troupe sur le plan technique! De quoi rebooster le moral des troupes !

Comme la compagnie (moyenne d’âge 25 ans), il est jeune (36 ans), et on sait que jeunesse et enthousiasme vont souvent de pair.

Les danseurs, pour la première fois depuis longtemps, auront l’impression que tout le monde a à nouveau ses chances, est à égalité. Avant que clan et chouchous ne surgissent – ce qui ne sera pas forcément le cas – il y aura un temps neutre, où les pendules seront remises à zéro.

De quoi redonner un peu d’ardeur à une compagnie qui a montré plus d’une fois des signes de lassitude…

Pendant les premiers temps, au moins, tout le monde «  y croira » à nouveau

 

Millepied, l’homme du renouveau : ma foi, ça me plaît !  Je lui souhaite en tous cas beaucoup de courage avec la paperasserie française qui en a fatigué plus d’un avant lui ! Espérons que comme Noureev, il saura faire avec, passera par-dessus les contraintes si «  françaises »  et donnera le meilleur à une compagnie que j’aime de tout mon cœur.

 

 

 


 
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11 novembre 2013 1 11 /11 /novembre /2013 09:56

 

 

 

J’avais pris des places pour deux raisons ; la première, pour voir Nicolas Leriche que je n’ai pas vu depuis Rendez vous ou Appartement, car ces 8 dernières années, j’ai joué de malchance quand aux grands Noureev : blessure, ou partenaire blessée, ou grève… (Le Lac, Casse Noisette, Le Prince de Cendrillon…)

Comme Nicolas termine sa carrière à l’opéra cette année, l’occasion était trop belle de le revoir une fois encore. Il aura durablement marqué mes 15 dernières années de spectatrice…

La seconde, est que je suis très sensible à l’esthétique et l’univers de Teshigawara.

C’est une histoire de coup de foudre. Elle a commencé avec Air, créé pour l’opéra de Paris en 2003 ;  alors que les trois quarts des spectateurs criaient à la fumisterie chorégraphique, j’étais complètement envoûtée par le travail sur l’air précisément qui était fait dans cette œuvre, où les corps comme dématérialisés semblaient se mouvoir en apesanteur. Une intense poésie se dégageait de l’ensemble ; Miteki Kudo, irréelle, était comme l’écume, ou comme un nuage qui  bouge, prend et change de forme au gré du vent, une simple petite brise la plupart du temps, comme le  zéphir de l’été.

Quand à Jérémie Belingard qui participait déjà à cette création, il était à la fois un concentré d’énergie toute intériorisée, de douceur, de fluidité, et d’intensité, parvenant sans peine à superposer plusieurs états en un seul et à les faire ressentir au spectateur.

A la fin du spectacle, les pensées avaient changé, comme si le mental avait trouvé une telle source de saveur, que nourrit, il s’était apaisé…

 

Teshigawara, artiste atypique, n’a pas fait de la danse son art favori ; il l’envisage comme un plasticien et traite à égalité la bande-son, les éclairages, les costumes, les poèmes, le dispositif scénique. Il a une conception globale de son ouvrage où le mouvement s’intègre à tout le reste, n'en est qu'un des composants.  

 

Ma deuxième rencontre se fit grâce à Arte qui diffusait Absolute zéro exécuté par le chorégraphe lui-même et sa partenaire d’alors. J’ai tout de suite adhéré à l’espace scénique blanc et noir, à l’économie du geste entièrement intériorisé mais qui en se déroulant donne à sentir tout un univers, à la justesse du mouvement. On a l'impression d'assister à quelque chose de sacré.  

 

Pourtant, Teshigawara le dit lui-même : il n’y a rien de spirituel dans son travail.    

 

Darkness is hiding black horses

 

Avant de venir à l’opéra dimanche, je n’avais assisté ni à la répétition publique, ni lu les nombreuses interwiew ou autres qu’on trouve ici et là et qui bien souvent me donnent la migraine plus qu’autre chose. C’est donc en ne sachant presque rien de l’œuvre que je me suis retrouvée dans la salle.

 

Une œuvre en mouvement

 

Il faut savoir qu’à l’origine, cette œuvre devait être une création pour quatre danseurs – Dupont – Gillot- Bélingard- Leriche

Gillot ne fait pas sa saison pour l’instant à l’opéra de Paris,  il ne restait donc que trois danseurs, ce qui ne posait aucun problème au chorégraphe. Ce trio est devenu un duo hier, car Leriche, visiblement blessé depuis jeudi dernier, devait être remplacé par Marc Moreau, qui s’est blessé  à son tour, quelques heures avant de monter sur scène. Dupont et Bélingard ont quand même voulu donner la représentation et je les en remercie du fond du cœur.

 

J’ai assisté hier à une œuvre à l’esthétique parfaite, pleine d’émotion. Rien de révolutionnaire, non. Du blanc, et du noir, un espace où surgissent parfois des vapeurs de fumée verticale et qui quadrillent, délimitent, morcellent l’espace, suivant.

Une bande-son emplie de bruits de nature, ou de sons plus angoissants… bref, des choses déjà utilisées ailleurs.

 

Alors ? Et bien, tout cela a fait naître un poème d’une intense douleur emplie d’espoir. Tout commence avec Aurélie Dupont, qui, debout dans un espace noir, tente de faire naître un peu de lumière. L’espace scénique est envoûtant : Teshigawara donne au noir une texture et une profondeur. C’est un noir d’encre, un noir de sèche, épais, qui engloutit tout à l’entour ; et la frêle Aurélie se tient là, droite, fragile, prête à disparaître et pourtant, bien décidée à diffuser, à irradier la lumière qu’elle est. Elle lève timidement les bras, elle ouvre l'espace.

Quand Jérémie Bélingard la rejoint, on assiste, hypnotisé, à une danse où le corps s’étire  à l’infini, jusqu’au bout des ténèbres comme pour les repousser, ou au contraire se contracte  en un point infime, pour leur échapper. La lumière  l'éclaire un peu, tente de le protéger. Que le mouvement soit fluide ou saccadé, il est toujours juste, terriblement vivant. Bélingard danse avec un instinct quasi animal qui bouleverse. On atteint grâce à lui à la Beauté absolue.  Car  le danseur disparaît dans la danse : cet abandon viscéral au mouvement qui se fonde à la musique et à l’espace donne une force, une cohérence, une intensité à cette œuvre qui submergent le spectateur à tel point qu’il est «  stupéfixié ».

 

Ce duo  oppose  les ténèbres et la lumière, un peu comme au début d’une cosmogonie. L' œuvre poétique, intense est  douloureuse mais l’espoir cependant n’est jamais absent. Les vapeurs qui surgissent plongent le spectateur dans un rêve, un peu comme ceux mis en scène par Kurosawa (Dream). On est à notre tour  happé dans cet espace d’où on ne veut plus sortir.  On veut rester là à jamais,  la pensée suspendue, jusqu’à comprendre l’origine du monde peut être, ou de soi même. Ou encore  accroché à la beauté qui fait taire le mental.

 

Un grand, grand merci pour ce moment hors temps plein de poésie et d'intensité.

 

Jeremaur.JPG

 

 

 

Du coup, il m’a été quasiment impossible d’être présente à la suite du spectacle, je voulais tellement rester avec Teshigawara que je n’ai pas pu être vraiment là pour Trisha Brown, dont j’aime pourtant infiniment son Glacial Decoy et ses lignes qui se décalent, et laissent à sentir un espace  qui se prolonge au-delà de la scène et encore moins au Doux Mensonges, dont je n’ai pu qu’écouter la musique, diviniment chantée et dirigée par les Arts Florissants.

 

glacial-decoy.JPG

 

De Glacial decoy, me parvenaient des silhouettes angéliques, mutines, qui jouaient avec les lignes, dans un silence bienveillant. Des êtres ailés, interdépendants les uns, les autres, comme ces silhouettes découpées dans du papier qu'on déploie pour les fêtes et qui bougent toute ensemble, solidaires. Je n'ai pas trouvé que les demoiselles étaient toujours très ensemble d'ailleurs, mais je n'étais pas non plus très objective. J'ai trouvé le tout un peu scolaire, pas aussi vivant que dans mon souvenir, mais il faut dire que Trisha est malade et n'est donc pas venue régler l'ensemble; cela se sent.


 

 

 

Pour Doux Mensonges, seule Abbagnato me ramenait régulièrement vers la danse, car mon esprit était entièrement tourné vers la musique, vers la beauté des voix, inintéressée que j'étais par ce qui se passait sur scène et qui me semblait si fade, après le Teshigawara. J'étais encore avec Jérémie et Aurélie et j'aurais voulu en voir plus...  Parfois je regardais le grand drapé orangé au dessus des danseurs, espérant le voir évoluer comme les fumigènes du Teshigawara; allait il  devenir nuage, vapeur, écume?

Les vidéos m'ennuyaient, alors que je les avais beaucoup aimées les premières fois...

Il ne me reste donc de Doux Mensonges que la silhouette d'Abbagnato et son charisme inégalable. Dans cette oeuvre, sa technique est vraiment mise en valeur, elle y est sublime.

 

 

 

doux.JPG

    

 

 

A venir : un article plus complet sur Teshigawara

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